Mercredi 8 mai sort le second épisode de «Californian Muslims», documentaire en trois actes sur nos frères et soeurs vivant outre-Atlantique. Ils sont quatre. Quatre de nos compatriotes et coreligionnaires ont décidé de mettre leurs talents au service de cette entreprise pour le moins instructive.
A l’origine de celle-ci, une idée, une envie et la volonté d’un étudiant en médecine, Abderrahmane Hedjoudje. Katibîn l’a interrogé pour vous.
Qu’est-ce qui vous a motivé à entreprendre un tel projet ? Y a-t-il eu un déclic ?
A.H. : J’ai fait une partie de mes études aux États-Unis. J’ai pu découvrir la communauté musulmane américaine à cette occasion. J’ai été assez impressionné par son niveau d’organisation et par la liberté dont les musulmans jouissaient pour pratiquer leur culte sans complexe. A mon retour en France j’ai rencontré Sofiane, qui signe la réalisation du documentaire. Il travaille dans le monde de l’audiovisuel. Je lui ai raconté mon expérience et il m’a tout de suite proposé de poser des images sur cette histoire. De là est née l’idée de réaliser ce documentaire pour montrer cette réalité des musulmans outre-Atlantique. Nous avons souhaité faire voyager toutes celles et ceux qui le regarderont afin qu’ils puissent vivre (un peu) ce que nous avons vécu en étant sur place.
Pourquoi les Etats-Unis et plus particulièrement la Californie ?
A.H. : Les États-Unis représentent le monde occidental, la Californie encore plus. C’était tout le challenge du documentaire : aller à les rencontre des musulmans là où on ne les attend pas forcément. On a voulu montrer qu’il était possible d’être musulman, de respecter ses principes, ses valeurs tout en vivant dans une société occidentale. Les musulmans français sont trop souvent discriminés sous prétexte des principes de liberté, d’égalité, de laïcité qui sont très souvent dépeints comme étant des valeurs occidentales. Avec Californian Muslims nous montrons que d’autres visions existent au sein même du monde occidental et mènent très souvent à plus de tolérance, plus de respect et plus d’égalité. La Californie est ici un symbole de cette société.
Espérez-vous que cela puisse inspirer les Français ? et pourquoi ?
A.H. : Les musulmans français peuvent s’inspirer du modèle américain mais il serait incohérent de vouloir l’importer ou le copier. Les musulmans américains ont une histoire très distincte des musulmans français, les sociétés françaises et américaines sont également très différentes. En revanche, en tant que musulmans occidentaux, Français et Américains partagent les mêmes défis, doivent faire face à des problématiques similaires. Il est intéressant de voir ce qu’il se passe ailleurs afin d’en tirer le meilleur pour construire un modèle qui soit propre à la communauté musulmane française.
On devine votre admiration pour les frères et soeurs rencontrés, mais croyez-vous que les Américains sont à prendre en exemple ?
A.H. : Le terme admiration est un peu fort car nous essayons d’apporter un regard objectif, de transmettre le plus fidèlement ce que nous voyons sur place. Il est important de prendre une certaine distance par rapport au sujet qu’on observe, c’est du moins ce que j’ai l’habitude de faire dans mes projets scientifiques. En revanche il est vrai qu’on ne peut que saluer l’énergie des musulmans américains et leur volonté d’être des acteurs engagés de leur société. J’ai beaucoup de respect pour les personnes qui souhaitent apporter un changement positif. Encore une fois il faut être capable de s’inspirer du meilleur, pour toujours aller de l’avant et le dynamisme des musulmans américains est très communicatif.
Doit-on nécessairement passer par des concessions telles que la mixité ?
A.H. : Le mot d’ordre est d’observer des institutions, des personnes et de comprendre ce qui les motive à agir. Nous ne posons aucun jugement de valeur. Ce qui nous intéresse c’est de voir concrètement le travail des musulmans américains. La plupart des institutions s’ouvrent à tous, musulmans comme non musulmans, hommes et femmes avec toujours la volonté de faire vivre les valeurs islamiques. Nous ne pouvons que saluer de telles initiatives.
Le fait de vanter l’intrusion de musulmans à Hollywood est-il vraiment une bonne chose ? ou bien le reflet d’un mimétisme dommageable ?
A.H. : Les musulmans américains sont des acteurs de leur époque et de leur temps. Ceci à l’instar des musulmans qui s’impliquent dans le monde du cinéma, ces personnes tentent souvent d’apporter plus de compréhension, plus de dialogue. C’est une forme d’engagement qu’il est important de perpétuer. Il faut par ailleurs que les musulmans s’impliquent dans tous les domaines, pour mettre en avant leurs valeurs, et particulièrement dans les mondes des médias, du cinéma et des arts car ce sont les domaines qui touchent aujourd’hui le plus de personnes et dans lesquels les musulmans ne sont pas assez représentés.
Des frères et soeurs se sont plaints de la présence de musique dans vos vidéos, que comptez-vous faire ?
A.H. : Nous avons remédié à ce problème car nous souhaitons que le message contenu dans le documentaire touche le plus de monde. Au delà de la forme, c’est le fond que nous souhaitons transmettre. Nous avons mis en ligne une version sans musique du premier épisode pour répondre à cet objectif.
Si Dieu le veut, et comme suggéré au début du premier épisode, l’aventure se poursuivra et les mènera « aux quatre coins du monde ». C’est tout ce qu’on leur souhaite, ça et de formidables rencontres.