Le sujet du voile ou « hijab » revient souvent dans mes conversations avec des amis ou des collègues. La question fréquente qu’on me pose c’est « Pourquoi tu portes le voile? ». Il m’est très difficile de répondre à une telle question en quelques mots. Certes, je pourrais me contenter de dire « Parce que je suis musulmane et que ceci est pour moi une façon d’exprimer mon Amour pour Dieu ». Mais en réalité, mon choix de mettre le « hijab » ne s’est pas fait facilement car cela n’allait pas de soi pour moi il y a bien des années. Avant de prendre cette décision, je pensais que je n’avais pas besoin de me voiler pour exprimer ma foi. Je pensais aussi que ce n’était nullement une prescription pour les femmes musulmanes de se voiler.
En 2004 a débuté toute la polémique sur le port du voile à l’école. Cette période a été pour moi un tournant dans ma pratique et ma foi. J’étais alors en 2e année de classe préparatoire au concours de l’ENS Lyon. Je ne pensais qu’à une chose, c’était réussir mes études et avoir un métier qui me passionne. Je me destinais à faire du journalisme et je préparais aussi le concours d’entrée à l’Institut Français de Presse d’Assas. J’étais donc également à un tournant dans ma vie d’étudiante. Je suivais avec attention tous les débats à la télé sur le voile, je lisais tous les articles ou dossier sur le sujet, j’assistais à des conférences…Je ne sais pas pourquoi mais le sujet me passionnait comme si je me sentais au fond de moi concernée. En matière de religion, je ne connaissais pas grand chose de mon Islam seulement quelques basiques que se doit de connaitre tout musulman.
La question du voile est donc devenue un sujet important uniquement lorsque toute cette polémique à débuté et qu’on a pensé à voter une loi pour l’interdire dans les écoles. Je me suis sentie personnellement attaquée car j’étais solidaire de toutes les filles qui ne pourraient plus aller à l’école voilées. Au sein même du lycée dans lequel j’étudiais, le voile n’avait jamais été une préoccupation des étudiants. On ne parlait jamais de ça ni même de religion, on ne parlait pas de prosélytisme ou d’islamisme. J’ai entendu ces termes pour la 1ére fois de ma vie dans les médias. Je trouvais cela complément absurde. Même dans tous les débats télé, il y avait toutes sortes d’amalgames et de discours profondément paternalistes, colonialistes voire carrément islamophobes! Les politiques avaient réussi à créer une psychose nationale autour du voile. On s’imaginait toutes sortes de fantasmes délirants. Puis le débat avait débordé sur les cités, les mosquées, les salafis, le wahhabisme, l’Iran, l’excision, le 11 septembre…Tout était prétexte à cracher sur l’Islam et les musulmans. Mais bizarrement, jamais jamais on n’a donné la parole aux premières concernées: les filles voilées! C’était comme faire un procès sans la présence de l’accusé. Car oui, c’est bien des accusées qu’étaient devenues ces filles, ces citoyennes Françaises dont le seul crime était d’être musulmane et de porter le voile.
Je me suis sentie révoltée, insultée, humiliée, rejetée, dénigrée! Ce sentiment de révolte s’est vite transformé en dégout puis en tristesse. J’étais triste pour mes sœurs en Islam, pour moi-même mais surtout pour mon pays, la France. Avant, je n’avais jamais réalisé à quel point on haïssait les musulmans de France. Je n’avais jamais ressenti ce qu’était l’islamophobie. Mais en 2004, j’ai compris que pour être acceptée en tant que musulmane, il fallait se faire toute petite. Cela signifiait effacer son identité, sa religion, ses racines. On nous accepterait mais à condition qu’on se conforme à un certain modèle de femme. Comme si il n’y avait qu’une façon possible et acceptable d’être femme dans ce pays!
Un jour, j’écoutais une émission sur une chaine arabe présentée par un grand savant musulman. Il parlait de la foi, des épreuves que tout croyant devait subir et du fait que les musulmans avaient de tout temps souffert de persécution. Il parlait aussi du « hijab » et de sa signification profonde. Dans mon coeur, j’ai ressenti un soulagement. Pour la 1ére fois de ma vie, j’entendais un discours tout à fait cohérent et empreint de bon sens. Quelques jours plus tard, j’avais décidé de porter le voile. Mais ce n’est pas seulement le discours de ce savant qui m’avait confortée dans mon choix. C’était aussi pour prendre la contre-pied de tous les discours pseudo-féministes qui voulaient que voilée=analphabète ou voilée=soumise oppressée. Je ne cache pas que j’avais très peur. Avec toute cette polémique autour du voile, je savais que j’allais avoir droit à des insultes, du mépris et des regards de haine. Je pensais aussi à mes études et mon avenir dans ce pays. Je savais que mettre un voile en France, c’était se fermer toutes les portes du monde du travail.
Quand je suis sortie dans la rue avec mon voile pour la 1ère fois, je me suis sentie libre! Je me suis sentie en complète harmonie avec moi-même. C’est tout ce qui manquait à ma foi. C’est tout ce qui me manquait pour trouver la paix. J’avais trouvé la sérénité car même si on me regardait de travers, j’étais protégée. Mon voile me rappelle sans cesse que je suis une femme musulmane et fière de l’être. Il me rappelle que je ne dois rendre des comptes qu’à Dieu. Il me rappelle que ce bas monde n’est qu’un voyage éphémère et que « tout âme goutera à la mort ». La beauté superficielle qui me préoccupait tant. La mode, la femme objet, le culte de l’apparence, l’obsession de plaire à autrui. Tout cela, je l’avais laissé derrière moi. Et Dieu que je me sens bien dans ma peau! Je suis enfin libre de toute contrainte!
Voilà pourquoi je porte le voile. Il est vrai que j’ai eu des phases difficiles dans ma vie. J’ai du affronter le racisme des professeurs d’université, celui des gens dans la rue et les transports, celui des patrons qui ne voulaient pas d’une voilée car cela entachait leur réputation, celui des médias, celui des politiques, celui de fonctionnaires dans les mairies ou autres administrations. Mais ça n’a fait que renforcer mes convictions et en un sens cela m’a ouvert les yeux sur la réalité de notre société Française. J’ai acquis une force de caractère inébranlable. Je me suis confiée comme mission d’éteindre cette peur autour du voile alors je ne ratais aucune occasion d’expliquer à qui voulait l’entendre que le voile est loin d’être l’instrument diabolique que nous présentent les médias. Et bien des personnes étaient tout à fait réceptives à ce que je leur disais. Ils finissaient même par me remercier!
Je n’ai au final rien perdu. J’ai tout gagné au contraire! Et si cela était à refaire alors oui, je le referais sans hésiter.
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Sublime article !
Si l’auteur passe par là j’aimerais beaucoup m’entretenir avec elle…
l’auteurE d’ailleurs !
Mâcha Allah quel beau témoignage
Sublime article effectivement , j’en reste ému cela me touche !!!
Mash Allah ..
As salumi aleykoum wa rahmatulahi wa barakatuh Jaimerai bien savoir si dans se reportage il y a enkor de la place ou c boucler et ou sa se passe car jaimerai bien en faire parti 🙂
Pour moi le voile c’est ‘ une liberté dans une cage pour la femme ‘ La Femme est une personne qui doit être respecté comme tout t’être que Dieu a fais sur cette terre .
Pourquoi les femme dans les pays maghrébine lutte pour leurs libertés alors quand Europe c’est le contraire qui ce passe ?
Je respecte les Religions mais il faut aussi respectés toutes les femmes de la terre .
Il y a qu’un D.ieu pour tout les hommes et femmes alors pourquoi ce conflit ,le voile c’est un prétexte pour causse la haines et la violence des peuples .
Il ne faut surtout pas oublier qu’un jour tout les êtres humaines aurons des contes a rendre devant l’Éternel .Car pour moi la Femme est égale a l’homme et la respecte .
D.ieu est Amour .
PeaceANDlove
Je porte le voile, et quand je suis à 2000m de mon travail je l’enlève, et des que j’ai fini mon travail et que je suis à 1500m de mon travail je le remet. Je respect donc le principe de mon entreprise.